C’est écrit : Najat Vallaud-Belkacem déconstruit la finalité de l’Ecole !

Najat Vallaud-Belkacem rend de pâles copies. Pourtant, entre les lignes, la ministre prend soin de fracasser l’Ecole de la République dans sa dimension émancipatrice. Sa dernière trouvaille : agiter le hochet de l’arrêt des notes pour réduire dans le texte la finalité de l’Ecole à l’acquisition d’un Smic éducatif : « L’acquisition par tous les élèves des connaissances, des compétences et de la culture définie dans le socle commun est la finalité principale de la scolarité obligatoire ». L’école au rabais des libéraux, individualiste et adéquationniste, est en marche et c’est Najat Vallaud-Belkacem qui la met en place. Pour la ministre et ses prédécesseurs, c’est zéro sur toute la ligne.

 Il aura donc fallu encore une fois un rapport commandé à un pourfendeur de l’école républicaine pour que le démantèlement de l’Ecole comme outil de l’émancipation individuelle et collective se matérialse et acte la transformation de l’Ecole. Reprenons. Au mois de septembre, Michel Lussault prenait la tête du Conseil supérieur des programmes (CSP) en remplacement d’Alain Boissinot qui avait jeté l’éponge. Aussitôt, le fier partisan du socle, de l’évaluation par compétences et de l’égalité des chances, s’attelait à la rédaction d’un rapport sur l’évaluation. C’est ce rapport qui a été remis à la ministre le 20 novembre et qui vient d’être rendu public ce 2 décembre (à télécharger ici : http://www.education.gouv.fr/cid75495/le-conseil-superieur-des-programmes.html .

Outre la diversion qu’il crée à travers l’arrêt proposé de la notation décimale, ce rapport raccroche l’évaluation de manière exclusive au socle commun mis en place en 2005 par François Fillon :  « Il s’agit aussi de construire une évaluation qui prenne au sérieux les apprentissages des élèves dans le cadre de la logique du socle commun».

Mais le rapport va plus loin encore : non content de soustraire les évaluations aux champs disciplinaires et à l’acquisition de savoirs, le rapport, au détour d’une phrase qui ouvre les propositions, fait définitivement basculer la nature et la finalité même de l’Ecole. Désormais, celle-ci ne vise plus qu’à permettre l’acquisition du socle commun : « L’acquisition par tous les élèves des connaissances, des compétences et de la culture définie dans le socle commun est la finalité principale de la scolarité obligatoire ».

Plus qu’un ballon d’essai, cette phrase est un scandale et une hérésie. Elle nie l’école dans sa visée émancipatrice et humaniste. Elle la circonscrit au contraire à un objet minimaliste et utilitariste. En créant un plafond artificiel, elle nie la capacité de chaque élève à progresser, à dépasser ce qu’il est pour devenir meilleur demain. En limitant le champ de l’école au socle, elle acte et organise l’existence d’une éducation à plusieurs vitesses. Par cette phrase, l’Ecole cesse d’être l’outil collectif qui crée du sens commun pour être renvoyée à un parcours individualiste au sein duquel chacun-e pourra, ou non, compléter le smic éducatif que l’Education nationale se contentera désormais d’assurer.

Ce n’est pas une petite affaire et c’est une véritable révolution. Le socle commun de Fillon avait été complété par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République du 8 juillet 2013 (loi Peillon) qui prévoit une évolution et une redéfinition du socle commun désormais intitulé « socle commun de connaissances, de compétences et de culture ». Déjà, les ministres de Hollande poussaient au bout la logique libérale de leur prédecesseur. Pourtant jusque là, le socle commun était encore défini par le ministère comme « ce que tout élève doit savoir et maîtriser à la fin de la scolarité obligatoire […]. Il rassemble l’ensemble des connaissances, compétences, valeurs et attitudes nécessaires pour réussir sa scolarité, sa vie d’individu et de futur citoyen» (lire ici : http://www.education.gouv.fr/cid2770/le-socle-commun-de-connaissances-et-de-competences.html ). En une phrase, le rapport du CSP fait donc basculer le champ couvert par le socle d’un noyau à la finalité de l’Ecole et donc à la totalité de ce qu’elle se doit de représenter

Voilà ce qu’il advient quand on confie des rapports aux détricoteurs de l’école républicaine. Voilà ce qu’il advient quand on reprend à son compte les outils des libéraux pour prolonger l’école de fracture éducative et sociale. Voilà ce qu’il advient quand on cède aux sirènes de l’égalité des chances et qu’on renie l’égalité. Ce rapport est un leurre. Ce n’est donc pas l’arrêt des notes qui est en jeu mais bien la pulvérisation de l’Ecole en tant que projet collectif pour élever le niveau conscience et de qualification de l’ensemble d’une classe. Ce rapport vaut un zéro pointé.

Quant à Najat Vallaud Belkacem, elle a une vision tellement rabougrie de l’Ecole qu’elle aussi pourrit tout ce qu’elle touche. Avec ces marchands de purin, plus rien ne transcende, plus rien ne porte la visée humaniste. L’idéologie capitaliste et consumériste leur colle tellement à la peau que tout est déconstruit. L’intérêt général n’a plus de sens réel. Ce n’est plus qu’un mot. La République de même et donc l’école de fait. Najat Vallaud-Belkacem est trop dangereuse pour l’Ecole et la République pour pouvoir plus longtemps accomplir son travail de sape dans l’impunité et être titularisée à son poste. Elle aussi doit être instamment révoquée.

3 commentaires sur “C’est écrit : Najat Vallaud-Belkacem déconstruit la finalité de l’Ecole !

  1. Dimitri Strutt dit :

    Le démantèlement de l’Ecole comme outil de l’émancipation individuelle et collective est un fait depuis longtemps. Ma scolarité en France (de 1983 au BAC en 1991) ne fut qu’ennui (l’élève est sensé simplement régurgiter des connaissances mal acquises) et stress (un seul objectif chaque année : ne pas redoubler). Je n’ai pas l’impression que les choses aient changé. Réformer la façon dont la progression de l’élève est évaluée est indispensable mais sans une révolution culturelle (et des moyens) à la finlandaise parents et professeurs contribueront à ossifier l’EN et le ministère à rester une bureaucratie sans but. L’évaluation par compétences et de l’égalité des chances demandent autre chose que l’invocation de principes de la IIIième Republique.

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  2. jpbrancato dit :

    L’évaluation par compétences est une saloperie sans nom, testée et abandonnée dans d’autres pays ! C’est le plus beau piège à cons éducatif que je connaisse !

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  3. […] un peu en arrière car nous avons ici-même traité de ces questions il y a tout juste un an (lire ici). A l’époque, la ministre se voyait remettre un rapport par Michel Lussault, celui-là même […]

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