Et revoilà la rémunération au mérite des fonctionnaires. Et comme de bien entendu, c’est M. Macron qui remet l’idée sur le tapis. Dans une interview publiée dans Acteurs publics, le leader d’En marche !, préconise également d’ouvrir le recrutement de la fonction publique à des cadres supérieurs de l’administration privé. Bref de faire voler en éclat ce qui définit le statut de la fonction publique, associant vulgairement celui-ci à un privilège quand il prévient au contraire contre le clientélisme et la corruption et qu’il est une garantie de l’intérêt général.
Rémunération au mérite, rétablissement du jour de carence, recrutements de droit privé, le tout assorti d’un coup de rabot de 60 milliards (Mds) d’euros de dépense publique avec – 25 Mds pour l’Etat, à nouveau – 10 Mds pour les collectivités locales et la suppression de 120.000 fonctionnaires : pas de doute, pour M. Macron, les fonctionnaires sont les ennemis à abattre.
Le mépris suinte dans ses propos lorsqu’il confirme, comme M. Fillon, être favorable au rétablissement d’un jour de carence dans la fonction publique, estimant que sa suppression est source d’inéquité en raison d’un système de contrôle plus laxiste des absences dans la fonction publique : « C’est à cette différence que je souhaite m’attaquer. Ma proposition est la suivante : restaurer le jour de carence dans le public tant qu’un dispositif de contrôle équivalent à celui du privé n’aura pas été mis en place ». Il n’y a décidément que le vocabulaire policé de la bonne société qui l’empêche d’exprimer plus clairement sa pensée en ces termes : les fonctionnaires sont des tire-au-flanc. Et tant qu’à aligner, le privé doit bien sûr pour lui servir de modèle.
Ministre de l’économie de son désormais soutien François Hollande, M. Macron s’était déjà fait les dents sur les fonctionnaires : 40 milliards d’euros de dépense publique ont été soustraits à l’intérêt commun durant la dernière période 2015-2017 par le zélé locataire de Bercy à l’époque.
Mais M. Macron ne se contente pas de s’en prendre aux fonctionnaires. A travers eux, c’est la fonction publique en tant que modèle républicain auquel il s’attaque. Il entend aller plus loin en remettant en cause insidieusement le statut. En septembre 2015, il jugeait que celui-ci n’était « plus adéquat » et « plus justifiable compte tenu des missions » lors d’un débat public au think tank En temps réel». Depuis, en vieux politicard, il ne cesse de jurer une main sur le cœur ne pas vouloir « remettre en cause le statut de la fonction publique », tandis que de l’autre il s’active pour dépouiller celui-ci de l’intérieur. Du Macron pur jus en somme.
Parmi les axes privilégiés, les recrutements hors statut justement, ceux que M. Macron appelle dans son interview à Acteurs publics « le recrutement de la fonction publique à des cadres supérieurs de l’administration privé ». Reprenant à son compte la proposition de M. Fillon, il annonçait déjà cela le 24 février 2017 dans Les Echos en disant vouloir « recruter hors du statut pour les fonctions d’encadrement », précisant alors que les collectivités locales « pourront également recourir plus largement à des recrutements de droit privé ». La suite, on la connaît : mettre le statut de la fonction publique en concurrence et faire cohabiter dans une même maison des agents sous statut et des cadres de droit privé aux intérêts antagoniques, les uns garants du service rendu et les autres de la compétitivité, pour terminer sur un service public phagocyté comme chez France-Télécom, diminution du service et explosion de la précarité et de la souffrance au travail à l’appui.
Complément nécessaire à cette dissociation que voudrait introduire au sein de la fonction publique M. Macron, la rémunération au mérite. Jusqu’à présent, les fonctionnaires bénéficient non pas d’un « salaire » mais d’un « traitement ». Celui-ci est versé en contrepartie des services fournis par un agent pour la collectivité. Cette rémunération est fixée en fonction du grade de l’agent et de l’échelon auquel il appartient selon une grille créée à la Libération par la loi du 19 octobre 1946 et qui est actuellement régie par l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983 modifiée, œuvre de François Mitterrand et d’Anicet Le Pors.
Le traitement est donc en lien avec l’objet du service public lui-même. C’est le service qui est assuré en ce qu’il est universel et fournit dans un même souci d’égalité à tous. Il ne peut devenir dépendant ni de la personne qui l’applique ni de celle à laquelle il est fourni. Le traitement et le statut sont justement ce qui met le fonctionnaire à l’abri des tentations et des intérêts particuliers pour garantir son action au service de l’intérêt général.
Ce que cherche M. Macron par ce double jeu sur les contrats de droit privé et sur les rémunérations, c’est permettre l’explosion des salaires dans la haute fonction publique, attirer des managers surpayés au détriment de la grille indiciaire qui donne pourtant son sens au corps de la fonction publique. Car il ne faut pas s’y tromper et d’ailleurs M. Macron ne s’en cache pas : la rémunération au mérite pour les agents de catégorie B ou C sera de bien peu d’influence sur la paye qu’ils toucheront à la fin du mois tandis que ce sera un outil coercitif pour les mettre sous pression.
A l’heure où la fraude gangrène la sphère publique comme cette sordide campagne présidentielle en fait étalage, il n’y a pas de raison a priori que la fonction publique reste à l’abri de telles pratiques, sauf à ce que le statut justement soit un bouclier contre les pratiques immorales qui se dédieraient de la vertu républicaine. Cela passe le recrutement par concours et la liaison entre la rémunération et le salaire au détriment de la mise en concurrence des agents entre eux. Peu en chaut à M. Macron, l’importation des pratiques de Caste dans chaque pan de la société semble pour lui une priorité. Le 23 avril nous en préserve !
Ce qui est dramatique en plus et que les gens n’arrivent pas à percevoir en règle générale que chaque fois que l’on attribue, où que ce soit dans le monde, la prise en compte d’un besoin fondamental des individus, ça coûte plus cher et le service est plus mauvais, santé, petite enfance abandonnée, maisons de retraite, eau, énergie, énergie, transports, autoroutes, etc,…. Je ne vois pas comment faire comprendre cette pourtant évidence
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Les fonctionnaires forment un bouc-émissaire idéal : ça marche à chaque fois !
Sauf qu’en tapant dessus, on oublie un peu trop facilement que grâce à eux la baraque continue de tenir (on essaie sans les écoles, les hôpitaux, les commissariats, les musées, les bibliothèques, les crèches, les casernes de pompiers, les prisons, les tribunaux, les préfectures, les administrations diverses et variées, les entreprises publiques, etc. etc. ?), qu’ils participent largement à l’effort national (merci le gel du point d’indice, le non-remplacement des départs à la retraite alors que les missions augmentent sans cesse…), qu’ils produisent de la richesse (contrairement aux accusations mensongères comme quoi ils seraient une charge – voir les mises au point salutaires des économistes atterrés notamment), etc. etc.
Opposer le privé au public est une absurdité ! On continue de diviser les Français pour détourner leur regard des vrais problèmes et des vrais enjeux. Ce sport adoré de la plupart des politiques est vraiment indécent (je l’ai dit plus longuement là : https://cincivox.wordpress.com/2015/09/28/cessez-le-feu-sur-les-fonctionnaires/).
Merci, cher François, de relever le niveau.
Cincinnatus
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Résistance !, Résistance !.
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Ouvrir le recrutement, qui est par concours, aux cadres supérieurs du privé, démontre la justesse et l’efficience des analyses de Bernard friot. Il faut rappeler que le travail des fonctionnaires dans l’ensemble produit un quart du pib, qui est du non Marchand produit par des non marchandises, les fonctionnaires ne passent pas par la case chômage ni ne sont assujettis au marché capitaliste de l’emploi : les détenteurs de capitaux les actionnaires, par quoi ils ne mettent en aucun cas en valeur l’action d’un propriétaire lucratif, par quoi l’état, n’est pas un employeur, c’est pourquoi il aurait fallu que la gauche encore au pouvoir reintegre les fonctionnaires territoriaux dans la fonction publique d’État : lettre morte, on comprend aisément pourquoi
Ce qui a été démontré c’est que cette production hors marché capitaliste de l’emploi a défini une autre conception et définition de la valeur Économique ce qui suppose de comprendre qu’ a été inventé une autre institution du salaire qui n’est ni plus ni moins que le salaire à vie des fonctionnaires et qu’il faut impérativement étendre à l’ensemble des salariés de notre pays.
C’EST cela qui est visé par la droite et en l’espèce dans cet article par Macron, là, et pas ailleurs que nous sommes au cœur de la lutte des classes qui oppose le salariat qui doit se constituer comme classe révolutionnaire, au sens donné par Bernard friot : changer le mode et la valeur de ce que l’on appelle produire, et la classe capitaliste qui impose la force de ses institutions du salaire, par quoi la propriété lucrative est au centre de la lutte par l’appropriation de la valeur produite par les seuls producteurs, les salariés que la classe capitaliste ravalé au rang de mineurs économiques en leur extorquent la plue-value…Bon je m’arrête et bon soir à tous
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Je pense que certaine mesure son indispensable pour rendre les procédures plus efficace. Un peut de préssion peut donner un meilleur rendement, mais il faut faire attention au dérivés car trop de préssion peut entraîner des Black out. De plus j’espère que ces mesures ne touchera pas l’ensemble du personnel soignant hospitalier qui n’a certainement pas besoin de telle mesure.
Au contraire elle aurais besoin de renfort pour les soulager un peut et pour un meilleur confort pour les patients.
Voilà mon avis.
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J’espère que macron ne passera pas le 1er tour. C’est la meilleure façon de préserver l’avenir du personnel soignant hospitalier, entre autres.
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[…] Cet article, certes partisan, s’appuie sur de nombreuses sources pour démontrer la volonté d’Emmanuel Macron de défaire le statut de la fonction publique. […]
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