Le 8 mars, le psychanalyste Gérard Miller plaidait dans le journal Le Monde pour un vote d’adhésion à la présidentielle et pour s’abstraire du chant des sirènes sondagières qui conduisent au reniement et au final à l’impuissance. Ce dimanche c’est son frère, Jacques-Alain Miller, ancien président de l’association mondiale de psychanalyse, qui se croit tenu de lui répondre dans le même journal (hum hum…) pour s’effaroucher du danger Le Pen et, sous ses airs ingénus, se faire le chantre du vote utile non sans fustiger au passage Jean-Luc Mélenchon. Défendre l’avenir d’une illusion en somme.
En structurant l’élection et le processus démocratique autour de Mme Le Pen (« L’univers sait l’enjeu de l’élection : la victoire ou la défaite de Marine Le Pen » nous dit Jacques-Alain Miller), le psychanalyste impose une logique référendaire et donc binaire au scrutin. Dès lors, il peut bien se cacher derrière le paravent de son appel aux « différents secteurs de la société civile [à] se mettre en mouvement […] pour alerter le pays sur la menace que représenterait pour tous l’accession au pouvoir de Marine Le Pen », il plaide en réalité pour le vote utile. Mais que n’y-a-t-il pensé plus tôt ! A 42 jours du scrutin, Jacques-Alain Miller sait très bien qu’il rabat en réalité vers le vote utile.
Celui-là le théorise par l’absurde sans nommer l’objet de son choix. D’autres l’affichent depuis quelques jours ostensiblement et mettent un nom sur l’ustensile : M. Macron. Daniel Cohn-Bendit a comme de bien entendu ouvert le bal en signifiant qu’il choisirait le bulletin de vote Macron si celui-ci permettait de battre Mme Le Pen. Le ministre des affaires étrangères Jean-Marc Ayrault ne disait pas autre chose jeudi 9 mars sur France-Info. La veille, c’est Bertrand Delanoë qui justifiait de la sorte son ralliement à Macron non sans esquinter au passage Benoît Hamon et son programme qu’il qualifiait de rien moins que de « dangereux ». Quant aux Braouezec et autres Gatignon, ils souffrent des mêmes maux et succombent eux-aussi au renoncement aux convictions pour chercher refuge chez l’intéressé.
A droite, ce n’est guère mieux. M. Macron est le réceptacle de ceux qui quittent le navire Fillon : ici, la justification du vote utile ne tient pas tant dans la peur de l’extrême-droite que dans celle de l’échec annoncé du candidat Fillon rattrapé par sa soif d’argent public pour établir son confort personnel. Le vote utile n’est alors pas seulement un vote de résignation, il est aussi un vote opportuniste.
D’aussi loin que je me souvienne, les gens de ma génération ont été appelés au vote utile d’élection en élection. Et depuis 2002, le FN a pris une nouvelle dimension comme chien de garde du système : d’abord pour justifier du report de voix au second tour, puis comme rabatteur dès le premier tour sur les partis du système. Aveugles ceux qui n’ont pas vu que ce glissement du second tour sur le premier traduisait en parallèle l’effondrement de la force dynamique propre de ces partis. La paresse idéologique et militante de ces organisations les a poussées toujours plus avant vers l’abus du vote utile progressivement érigé en argument unique.
Immanquablement, l’étape suivante ne pouvait être que l’abandon au vote utile, épaulé par la prescience sondagière, de la définition du paysage avant même l’élection. PS et LR qui se voulaient hier valeur refuge ont implosé et abandonnent l’argument du vote de la contrainte et de la résignation à M. Macron. Le vote utile ne se contente plus de réguler l’élection, il la fait sondages aidant.
Si l’enrobage change, le principe reste le même et le vote utile nourrit toujours un peu plus les désillusions de demain. Car le vote utile génère de l’abstention : 32 % dans l’enquête du Cevipof publiée dans le journal Le Monde du 9 mars, un taux historiquement haut pour une présidentielle. Au final, le vote utile, en tuant l’envie démocratique des citoyen-ne-s, renforce le Front national qu’il prétend combattre.
Croire au vote utile pour lutter contre le FN est une illusion. Jacques-Alain Miller devrait s’en méfier lui qui doit pourtant connaître ses classiques au premier rang desquels Freud qui nous enseigne dans L’avenir d’une illusion : « Nous appelons donc une croyance illusion lorsque, dans sa motivation, l’accomplissement de souhait vient au premier plan, et nous faisons là abstraction de son rapport à la réalité effective, tout comme l’illusion elle-même renonce à être accréditée ». Rien ne porte à croire que M. Macron puisse représenter un quelconque rempart contre le FN sinon la foi dans les sondages.
Croire en M. Macron, qui considère que « la politique c’est mystique » comme il l’affirmait encore le 12 février dans le JDD, pour être le dépositaire du vote utile dédouble l’illusion. Celui-là sert l’intérêt de la Caste des puissants qui subliment sa campagne. Or « on peut réclamer de tous les hommes qu’ils appliquent le don de la raison qui est en leur possession, mais on ne peut édifier un devoir valable pour tous sur un motif qui n’existe que chez un très petit nombre » nous enseignait le bon maître. Au vote utile stérile et contre-productif, il faut opposer le vote de conviction et d’engagement par la Raison, celui qui ramènera le peuple aux urnes sur un projet partagé pour un Avenir en commun : le bulletin de vote Jean-Luc Mélenchon est celui-là.
Je ne me lasse pas de répéter que pour la gauche un candidat unique dès le premier tour de la présidentielle conduit à l’échec. Cela a été vérifié deux fois sur deux: 1965 et 1974. Il y a besoin de clarté. Pour ça chacun doit défendre son point de vue au lieu de chercher une synthèse bancale synonyme de flou artistique.
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Il peut y avoir un seul candidat, mais en dehors d’une proximité plus ou moins grande et appréciée, la question essentielle est celle de la confiance. Hamon a gouverné sans problèmes sous Valls, il est le candidat (mal aimé, il est vrai) du PS au pouvoir. Un seul candidat si c’est Mélenchon, c’est envisageable : on peut avoir confiance en Mélenchon. Si le PS continue de lâcher Hamon, le fait pour lui de rejoindre Mélenchon apparait comme un peu de bon sens. Mais telle n’est pas la mission de Hamon qui est de sauver le PS en bloquant Mélenchon. C’est pourquoi ce ralliement est peu probable.
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HAMON se ralliant à MELENCHON, c’est comme JUDAS se ralliant à JESUS!
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JAM est un vieux réac ultra sioniste. Cela n’empêche pas que son travail d’édition du séminaire de Lacan soit remarquable et incontournable. Macron et Le Pen sont deux inconnues. Voter Macron, ou Le Pen, c’est comparable à un saut à l’élastique sans certitude qu’il y ait un élastique. Macron c’est la dictature des hiérarques de l’UE, et de la finance. Le Pen c’est la confusion et le chaos, avec de vrais fachos en embuscade. Le vote utile est une prostitution. Voter en fonction d’un raisonnement à base de billard à deux bandes, c’est se prendre pour un grand manipulateur universel : mégalomanie. Le sage vote tout simplement pour ses idées. L’analysé aussi.
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le PCF ne parle pas de vote utile , il fait semblant de croire au rassemblement utile :
ils étaient très peu nombreux , ces militants du PCF , mais à s’accrocher comme cela à leurs places aux législatives , ne comprennent-ils pas que une nouvelle fois ils cassent la dynamique d’union derrière Mélenchon
parceque leur union derrière Mélenchon ils s’en foutent pas mal , ils savent très bien que la France insoumise ne s’alignera JAMAIS derrière le PS de droite ni même pour autre chose que notre programme l’Avenir en Commun
https://www.francebleu.fr/infos/politique/les-militants-de-la-gauche-reunis-nancy-pour-une-candidature-unique-la-presidentielle-1489255805
A noter l’intervention écrite d’un de nos candidat auprès de France Bleu sud lorraine pour dénoncer les nouvelles saloperies de leur représentant Bora Yilmaz qui voulait se présenter aux législatives comme l’unique candidat de la gauche soutenu par Mélenchon
Nous rappelons , nous militants de la France insoumise , qui comprend aussi des communistes , dont notre candidate Nassima Faiq , qu’il ne saurait y avoir d’autre candidature qui ne soutienne l’Avenir en Commun ,sans réserve et à tous les tours de toutes les élections , avec pour preuve de l’adhésion , la signature d’une charte qui nous engage dans notre parole , notre stratégie , notre respect des électeurs et notre devoir
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Les uns nous somment de nous mettre derrière Hamon, avec qui l’on aurait des convergences, mais en occultant les nombreuses divergences et un vrai passif d’un quinquennat calamiteux où il a pris sa part, les autres sont tentés part le vote Macron pour faire barrage au FHaine. On ferait ainsi dès le premier tour de la présidentielle comme si l’on était déjà au second tour.
Ce tour de passe-passe a bien évidemment pour objectif de ne pas parler des contenus des programmes ou de les survoler et interdire aux forces alternatives de compter leurs voix, de peser sur l’avenir. Cette attitude laisserait un boulevard à l’extrême droite. Le peu qu’il nous reste de démocratie serait anéanti pour le bien de l’oligarchie qui organise le tout à son seul profit. C’est bien là l’opération Macron avec la bénédiction de Hollande et d’une partie du PS. La politique du moins pire est toujours celle du pire. Je partage l’analyse de François Cocq
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